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Publié le 14 décembre 2018

Effet laser dans du germanium à bande interdite directe

Une collaboration de chercheurs du C2N et de STMicroelectronics a obtenu pour la première fois un effet laser dans du germanium présentant un alignement direct du diagramme de bande électronique alors qu’on pensait ce matériau incapable d’émettre de la lumière.

Le germanium (Ge) appartient à la même famille que le silicium et il se marie parfaitement avec les procédés CMOS de fabrication de puces électroniques. Il est déjà utilisé dans des puces photonique en silicium. Néanmoins la source optique constitue aujourd’hui le chaînon manquant à l’élaboration de dispositifs photoniques complexes utilisant l’environnement bas coût du CMOS. Jusqu’ici, ni le silicium ni le germanium n’ont permis d’émettre de lumière en raison d’une barrière fondamentale : le caractère indirect de leur structure de bande.

Grâce à des travaux sur les propriétés de la structure électronique du Ge, les chercheurs du C2N ont pu le transformer en matériau à bande interdite directe, permettant l’émission de lumière. Pour cela ils lui ont appliqué de fortes déformations en tension. Ils se sont inspirés des méthodes CMOS, à savoir l’utilisation de films contraints pour déformer des canaux de transistor et exalter les propriétés de transport de charge. En vue de réaliser un démonstrateur laser, ils ont revisité cette méthode pour déformer des cavités optiques résonantes, sur des volumes beaucoup plus élevés que des canaux de transistors. En collaboration avec des chercheurs de STMicroelectronics, ils ont ainsi pu obtenir pour la première fois un effet laser dans du germanium présentant un alignement direct du diagramme de bande électronique. Leurs travaux ont été publiés dans APL Photonics. La structure réalisée consiste en des micro-disques de Ge ‘’tout entourés’’ d’un film contraint de nitrure de silicium. Cela a permis de fortement déformer le Ge en tension et d’atteindre le régime de bande interdite directe. Le micro-disque de Ge contraint repose sur un pied métallique en Al, un excellent dissipateur thermique. Grâce à cette double gestion de la contrainte et de la diffusion de la chaleur les chercheurs ont pu atteindre le régime d’émission Laser dans le Ge sous pompage optique continue.

Les chercheurs du C2N travaillent aujourd’hui sur l’alliage du Ge avec de l’étain, un autre élément de la colonne IV qui se marie bien avec le silicium, pour augmenter le caractère directe de la structure de bande. Cela devrait permettre d’améliorer les performances du dispositif, atteindre l’effet laser à température ambiante, et ainsi alimenter les futurs développements de la photonique silicium.

Références :
Germanium microlasers on metallic pedestals,
A. Elbaz1,2, M. El Kurdi1, A. Aassime1, S. Sauvage1, X. Checoury1, I. Sagnes1, C. Baudot2, F. Boeuf2 et P. Boucaud1
APL PHOTONICS (Août 2018)
DOI: https://doi.org/10.1063/1.5025705
1 Centre de Nanosciences et de Nanotechnologies – C2N (CNRS / Université Paris-Sud- Université Paris-Saclay)
2 STMicroelectronics, 850 Rue Jean Monnet, F-38920 Grenoble, France

Contact :
-    Moustafa El Kurdi, Maître de conférences Université Paris-Sud au C2N

Figure : A Gauche : spectres de photoluminescence sous différentes puissances de pompage optique continue. Des résonances contribuent au spectre au-delà d’un certain seuil de puissance. L’insert représente l’intensité intégrée et la largeur à mi-hauteur mesurées pour une résonance de mode de galerie en fonction de la puissance incidente. La photo MEB montre la cavité microdisque de Ge avec une couche de stresseur de SiN sur la face inférieure et soutenue par un pied en aluminium. La photo a été prise avant la dernière étape de dépôt d’une deuxième couche de SiN permettant de réaliser la structure contrainte ‘’tout entourée ‘’ telle que représentée sur le schéma. A droite : structure de bande électronique du germanium déformé en tension sous une contrainte biaxiale et calculée dans un formalisme k.p à 30 bandes. La déformation en tension induit un alignement direct de la bande électronique pour des niveaux de déformations biaxiales de 1.7% et au-delà. © C2N/El Kurdi